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LES VERS DEVINS
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27 mai 2012

ROZEATIS

ROZEATIS

 

Nous étions en 2024, précisément à Kourou en Guyane française, le temps était humide et chaud et nous nous désaltérions à la terrasse du « Kalouga » tout en dégustant une marinade de crevettes. Julie était assise à ma droite avec, je m’en rappelle, une jolie robe jaune pâle, mi-longue et légère, qui avait une fâcheuse tendance à remonter le haut de ses cuisses à chaque bourrasque de vent, ce qui l’embarrassait puisque Stéphane, le cadet de l’équipe, était réputé pour être un « chaud lapin ». D’ailleurs, il suffisait de voir la manière qu’il avait de lécher la marinade avant de dévorer ces pauvres bêtes, qui entre ses doigts subissaient une deuxième mort, pour comprendre la pudeur de Julie. Nous faisions tous les trois partie de l’équipe sélectionnée par la Nasa, pour mener à bien un projet classé secret-défense dont seule une poignée de politiques et d’astronomes avait connaissance. Mes différentes missions et mon expérience d’ancien militaire m’avaient permises d’être nommé commandant en chef. Nous nous connaissions bien, il faut dire que notre entrainement avait duré deux longues années durant lesquelles nous étions totalement coupés du reste du monde. Notre seul contact avec la civilisation était une voix rauque et masculine, nous donnant les instructions et le programme de nos journées. Ce qui différenciait cette mission des autres, c’était non pas la distance, mais la totale ignorance de ce qui nous attendait là-bas. En gros, comme l’avait dit le colonel Faré lors de notre recrutement, ils nous envoyaient à une mort certaine. C’était excitant et terrifiant à la fois. Mais si nous avions gagné notre place, c’est que nous étions justement ce genre de casse-cous prêts à tout pour faire avancer la science. Et puis, il faut dire que le jeu en valait vraiment la chandelle : c’était la première fois qu’on découvrait une autre planète, qui selon les élites de l’astronomie était susceptible d’être habitée. Par qui, par quoi ? Personne n’en savait rien. Nous étions tous ultra-qualifiés, mais chacun avait aussi été choisi pour ses propres qualités. Stéphane était une sorte de « Mac Giver » des temps modernes, un génie de la débrouille. Julie était pour sa part une diplomate hors pair capable de pacifier la terre entière. Quant à moi, j’étais une sorte de Bear Grylls expert en art martiaux et meneur de troupes. Il nous restait un peu moins de quarante-huit heures avant le grand départ, et comme il est coutume de faire avant ce genre de voyage, il fallait que nous en profitions un maximum. La priorité était je pense pour nous trois, d’assouvir notre besoin charnel puisqu’il était clair que Julie n’avait pas vocation à nous distraire.

 

Pour ma part, je me rendis au « Bambou », un night-club réputé à Kourou pour ses soirées torrides. Je m’assis au bar et commandai quand, mêlé d’un éclat de rire presque moqueur, quelqu’un me tapât violement sur l’épaule ! Je me retournai et là Stéphane, complètement ivre, hurla à la serveuse qui, bien qu’habituée a ce genre d’attitude, n’en demeurait pas moins grimaçante :

« C’est mon invité ! ».

            J’eus beau essayer de lui faire comprendre que nous allions passer neufs longs mois ensemble, et que j’aurais éventuellement apprécié la compagnie d’une hôte plus charmante, je sentais bien que ce goujat avait besoin de ma présence rassurante. Je le compris notamment quand deux colosses approchèrent de nous avec quelque chose dans les yeux qui en disait long sur leurs intentions, à l’égard de mon compagnon de beuverie en l’occurrence. Je m’apprêtais à leur régler leur compte quand Julie, superbe, dans une tenue frôlant l’indécence, me souffla dans l’oreille :

« Garde tes forces Rambo, laisse moi faire. ».

            Nous ne la revîmes pas de la soirée, pas plus que les deux gaillards d’ailleurs. Il était tard ou plutôt tôt devrai-je dire, et, bredouille, je décidai d’aller me coucher en invitant mon cadet à en faire autant. Demain, nous aurions besoin d’être en forme, et peut-être que durant les quelques heures qui nous restaient en tant que terrestres, nous avions autre chose à faire que vomir nos tripes. Il m’écouta, et chacun de notre côté retrouvions notre hôtel confortable.

 

Plus question de crevettes ou de tenues équivoques : nous voilà concentrés, chacun à notre poste, angoissés car nous savions qu’un décollage sur huit explosait en vol avant même d’avoir atteint la stratosphère. La peur se lisait sur nos visages, sûrement autant que l’impatience. Le Colonel Faré nous donna les dernières recommandations, et nous souhaita, sans trop y croire, bonne chance.

« 5-4-3-2-1… »

            Dans un bruit assourdissant, nous quittâmes la terre pour, si tout se passait bien, neuf mois minimum. Après quelques minutes de vertige expliqué par la peur et l’adrénaline, nous nous félicitâmes de la réussite du décollage. Notre première mission était de vérifier si tous nos appareils de navigation fonctionnaient bien. Tout était en ordre. Il était temps de passer en mode VLA (Vitesse Lumière Accélérée) et de rejoindre nos couchettes respectives, afin de plonger dans un sommeil conservateur de trois longs mois.

            Comme s’il ne c’était passé qu’une nuit, l’alarme nous réveilla comme convenu à l’approche de Rozéatis. J’avais fait des rêves érotiques dans lesquels Julie, habillée de la même tenue qu’au night-club, se faisait prendre sauvagement par les deux hommes, lubriques et montés comme des chevaux. Elle m’appelait à l’aide tout en jouissant de plaisir. L’un était allongé sur le dos : elle l’enfourchait tout en lui griffant le torse. L’autre la sodomisait en lui tirant ses deux petites couettes qui lui donnaient un air juvénile et dévergondé. Son mascara coulait le long de ses joues, elle me tendait le bras avec la main ouverte, comme pour s’agripper à mon pénis, mais je restais assis, à la regarder jouir et j’aimais ça. Il fallait que je reprenne mes esprits au plus vite ; je l’entendis s’approcher du cockpit, et, sous ma combinaison, il aurait fallu être aveugle pour ne pas voir mon érection. J’entendis Stéphane vomir, victime du mal de l’espace, à moins que ses rêves n’eussent étés plus osés que les miens, à lui en donner la nausée. Sur notre radar, nous distinguions notre objectif, nous revînmes à une vitesse normale et reprîmes en manuel les commandes de la navette. Il régnait une ambiance étrange au sein de nos deux mètres carrés, on sentait bien que ce long sommeil nous avait tous un peu troublés. J’intervins et rappelai à mes deux partenaires qu’il fallait rester concentré. En leur disant ça, il était clair que je me le disais à moi aussi. Nous ouvrîmes les volets qui nous protégeaient des radiations relatives à la VLA. Aucun adjectif ne serait assez fort pour décrire le spectacle que nous découvrîmes, et que nous offrait l’espace. Aussi hostile que magique et enivrante, nos appareils photos et vidéos immortalisaient cette splendeur, même si nous n’étions pas certain qu’un jour quelqu’un pourrait exploiter ces documents uniques. Notre mission consistait maintenant à rester en orbite, et à l’aide d’une sorte de voiture à voile solaire, à tenter de poser sur cette planète inconnue un robot conçu et télécommandé par Stéphane. Il devait y prélever quelques échantillons et faire quelques analyses, notamment pour savoir si l’air y était, ou non, respirable, et pour que nous puissions faire les mélanges adéquats qui nous permettraient de survivre lors de la prochaine étape, sûrement la plus dangereuse : marcher sur Rozéatis.

 

            Tout s’était bien passé, notre robot avait fait des merveilles, il avait pris des vidéos exceptionnelles, et ces prélèvements s’avéraient être des plus utiles. S’il avait été humain, je pense que nous l’aurions embrassé. Stéphane avait vraiment fait du bon boulot, alors c’est lui qui eut droit à notre flopée de félicitations. Il fut très gêné de cette situation. Nous examinâmes avec attention les analyses de l’air à la surface de Rozéatis, tout laissait à penser que nous pourrions y respirer de la même manière que sur la Terre. C’était étonnant, presque impossible, tellement nous en avions rêvé. Je pris la décision de faire une vérification complète de la navette et de retourner sur Terre. Je pensais que la somme d’information amassées suffisait amplement à assouvir les besoins de nos congénères restés en base, et qu’il était inutile de risquer notre peau. Une autre mission pourrait en effet être renvoyée en tant voulu, et notre priorité était de leur rapporter la preuve qu’une autre planète était habitable par l’espèce humaine. Pour moi, c’était une mission accomplie, et tant pis si je devais passer devant conseil de discipline pour n’avoir pas exécuté les ordres jusqu’au bout. Nous étions euphoriques, nous avions en notre possession sûrement la plus importante découverte de toute l’histoire humaine. Pourtant quelque chose me fit comprendre que nous n’étions pas au bout de notre peine. Je vis Stéphane passer sa main dans sa braguette et en tirer son sexe, il chantait tout en urinant sur mes bottes. Interpelé, je lui dis d’un ton sec, tout en me reculant pour éviter son innommable :

« Sergent ressaisissez-vous ! »

            Il me regarda avec des yeux mi-clos et un sourire bête, et finit sur la combinaison de Julie. Il avait été le seul à toucher le robot et je savais, malgré ses extravagances naturelles, qu’il n’était pas du genre à manquer de respect à son supérieur, sauf lorsqu’il était ivre. Julie l’avait compris aussi et ne lui en tint pas rigueur, puis quelques secondes après il tomba dans mes bras, endormi. Julie me dit :

« Nous ne rentrerons pas ce soir commandant. »

« Non caporal, pas ce soir en effet », lui répondis-je.

            Je lui ordonnai de faire les vérifications de la navette pendant que je mettais Stéphane en zone de quarantaine. Ceci fait, je lui demandai, non pas en tant que supérieur mais en tant qu’ami, si elle se sentait prête pour tenter l’exploration de Rozéatis avec moi. Elle me fit un sourire et me répondit :

« Qu’attendons-nous Rambo ? »

 

 

            Nous mîmes nos combinaisons, et rejoignîmes nos voitures à voile. Nous en avions chacun une. Nous nous regardâmes une dernière fois et, après quelques secondes, je pressai le bouton d’ouverture à distance de la navette. Nous avions fait le grand saut. C’était magique : nous nous laissions porter par les courants spatiaux et approchions régulièrement de Rozéatis. Je fis un signe du pouce à Julie pour lui signifier que tout allait bien, et elle me le rendit. Comme par enchantement, les décors se dessinaient sous nos yeux. C’était splendide, et sans savoir de quoi il s’agissait vraiment, c’était un délice pour les yeux. Nous nous posâmes presque simultanément sur une vaste étendue bleu pastel, une sorte de pelouse. Nous devions être approximativement à cinq-cents mètres l’un de l’autre. Nous pouvions nous voir. En marchant chacun dans la direction de l’autre comme la procédure nous l’imposait, nous ne pouvions nous empêcher de nous demander si nous pouvions retirer nos casques. A quelques cinquante mètres d’enfin nous retrouver, Julie retira le sien, j’eus beau lui hurler :

-« Non ! Ne fais pas ça… », déjà elle respirait à pleins poumons l’air de Rozéatis. Heureuse du bon dénouement de sa prise d’initiative, elle me sauta au coup. Je la tins doucement à distance tout en lui rappelant qu’elle venait de désobéir à un ordre. Mais au fond de moi, j’étais vraiment heureux qu’elle soit en vie. Cependant, je me rappelai de l’état de Stéphane et ne retirai pas tout de suite le mien. Après avoir pris soin de cacher nos appareils volants, nous décidâmes de marcher vers le nord. Julie ne cessait de me demander de retirer mon casque, vantant la douceur et le parfum de cet air qui la ravissait. Elle était belle, mais je savais qu’elle n’aurait pas dû ôter son casque et qu’elle le paierait d’ici pas tard. Du grand tapis bleu nous passions maintenant à une espèce de mousse rose-bonbon ; nous en avions jusqu’aux genoux. L’odeur que Julie me décrivait était celle du nougat chaud, quand d’un coup elle tomba et disparut sous cette épaisse couette mousseuse au parfum de friandises. Seul son sac à dos immergeait encore ; je l’attrapai par celui-ci et la relevai. Groggy, elle avait le même regard que Stéphane. Elle essaya de m’embrasser malgré mon casque. Loin de tout, l’occasion était trop bonne pour ne pas la saisir, mais mon esprit était ailleurs, concentré, à l’affût, aux aguets. L’ancien héros de guerre que j’étais avait la certitude que quelqu’un ou quelque chose nous observait. Je l’endormis avec la délicatesse de ma gifle droite et la mit sur mon épaule, comme on porte un sac à patates, afin de continuer notre progression. Le peu de relief me réconfortait dans le sens où, si on nous attaquait, je verrais le danger venir, et en même temps m’inquiétait, puisque rien ou très peu ne pouvait nous abriter ou nous cacher. Mais d’où alors venait cette présence que je ressentais de plus en plus proche ? Je levai les yeux vers le ciel et vis dans ces nuages fuchsias un regard disparaître. Les poils de mon corps tout entier se dressèrent, je sentis que quelque chose allait se passer. Je mis Julie en position d’écharpe autour de mon cou, comme un chasseur porterai sa biche assassinée, afin d’avoir mes deux mains libres, et je pris dans la gauche mon couteau de survie, celui qui avait fait mon gibier inanimé me surnommer Rambo. J’avais peur ! Mais je continuai d’avancer. J’arrivai, ou plutôt nous arrivâmes au bord d’un gouffre surplombant ce qui paraissait être un village. Je n’en crus pas mes yeux. J’entendais au loin ce qui me paraissait être la vie. J’essayai de réveiller Julie avec la délicatesse de ma gifle gauche, en espérant qu’elle irait mieux. En effet j’avais besoin d’elle ; elle était de nous deux la plus apte à nouer un premier contact. Elle ouvrit doucement les yeux et s’excusa pour son attitude gourmande de tout à l’heure, elle avait honte, elle me dit en me vouvoyant :

« Vous aviez raison commandant, je n’aurai pas du retirer mon casque. ».

            Je lui fis un sourire et lui répondit :

« Caporal, je compte sur vous pour être à la hauteur cette fois, aller remettez moi-ça ! »

            Il fallait que je la brusque un peu ; nous avions un dénivelé à descendre en rappel de plus de soixante-dix mètres à vue d’œil. Elle me comprit. Tout comme moi, elle n’en crut pas ses yeux de voir un village animé au bas du précipice. Notre descente achevée, nous fûmes accueillis par ce qui semblait être une femme. C’était impressionnant comme cette forme de vie ressemblait à la nôtre. Elle se tenait droite devant nous, elle devait mesurer deux mètres vingt au bas mot : des jambes interminables, des hanches larges et une poitrine imposante. Elle avait un cou d’au moins quarante-cinq centimètres et une tête allongée sans aucun signe de cheveux ou de pilosité, ni sur le visage, ni sur le corps. Sa bouche était serrée malgré des lèvres qui semblaient siliconées, son nez était presque inexistant et ses yeux mi-clos me firent penser à ceux de mes deux acolytes dans leur état second. Elle regardait Julie avec méfiance, basculant ses épaules de droite à gauche comme on danse une valse, on entendait ses dents claquer. Sa peau passait d’une teinte à l’autre et sa texture semblait être agréable au toucher. Elle était envoûtante. Il était évident qu’il s’agissait de la chef du village. Les autres s’étaient retranchés dans leurs habitations faites d’une matière étrange qui ressemblait à des plumes de paon. Elles étaient hautes et rondes avec un plafond convexe, et une entrée qui laissait penser à un champ magnétique. De toute évidence ce peuple avait développé la télépathie. Je n’étais pas certain que Julie s’en fût aperçue, cependant elle avait bien compris que cette créature n’avait pas l’air de l’apprécier. Elle restait sur ses gardes tout en essayant de cacher son inquiétude. Moi en revanche, je semblais l’intriguer : quand elle me regardait son corps devenait rouge carmin, elle était calme alors qu’à l’inverse Julie semblait vraiment l’exaspérer ; elle devenait blanche, presque transparente, et son agitation n’allait qu’en grandissant. J’essayai de la rassurer en me prêtant au jeu du télépathe, ne sachant pas du tout si ça allait fonctionner. Ma surprise fut d’autant plus grande lorsqu’en moi j’entendis une voix qui n’était pas la mienne ni celle de mon inconscient, une voix douce, avec un léger écho, chaude, incitant presque à la luxure :

« Sois le bienvenu, étranger ! »

            Je la remerciai de son hospitalité, et tentai de lui expliquer que Julie était pacifique. Elle me répondit :

«  Je le sais, mais elle doit se soumettre à mon peuple si elle veut vivre, tel est la loi. »

« Ne lui faites pas de mal, répondis-je, il en va de notre bonne entente. »

« Ne t’inquiète pas, puisque tu le demandes elle aura la vie sauve, mais nul ne peut détourner notre loi sacrée. »

« Je comprends. »

            Je me tournai vers Julie et lui expliquai leur mode de communication ; j’en profitai pour lui dire qu’elle allait devoir accepter un rituel dont je ne connaissais pas le contenu. Bizarrement, elle n’avait pas peur. Elle regarda la chef du village et comme par soumission, elle baissa la tête. Dans un cri rappelant celui de l’aigle royal, la géante appela et nous vîmes deux autres créatures apparaître. Elles attrapèrent Julie vigoureusement. Pris de panique, je m’interposai, ce qui les mit au recul.

« N’ai pas peur Rambo, ca va aller. » me dit Julie, alors, je les laissai emmener mon Caporal dans une habitation que je pris soin de localiser. J’étais inquiet.

 

 

            Je fus l’invité de la chef du village, elle me conduisit dans sa «hutte» et me dit de m’asseoir sur une espèce de couche couleur or, tout en me rassurant sur la qualité de l’air. Je la remerciai tout en lui disant que sur notre espèce, ce dernier avait des effets secondaires. Mais je n’avais plus le choix, mes ressources d’oxygène arrivaient presqu’à terme, et toujours dans un souci de survie, je voulais en garder un peu au cas où j’aurai été obligé d’avoir tous mes esprits, notamment en cas de fuite précipitée. Je le retirai avec un peu d’appréhension, mais tout se passa bien. C’était comme sur Terre lors d’une promenade en forêt, un jour ensoleillé après que l’orage eut abreuvé les racines des arbres. C’était très reposant, mais je savais que mon état allait progressivement changer ; il me fallait donc l’accepter, tout en essayant de le gérer. Elle me fît apporter à boire et à manger, une nourriture à base de plantes multicolores et une boisson dont le goût âcre ressemblait à du café.  Elle s’assit en face de moi, elle ne disait rien, se contentant de me regarder. Elle ouvrît sa petite bouche et là je vis une large et saliveuse langue en sortir. Elle tomba sur sa poitrine. Ses tétons m’aspergèrent le visage tandis que je bandais comme rarement. Elle écarta ses cuisses et me fit découvrir une dizaine d’orifices tous plus excitants les uns que les autres.

« Touche ! » m’ordonna-t-elle, ce que je fis.

«  Lèche ! »

            Elle sentait bon et je la dévorai sans retenue, puis elle me déshabilla et suça mon humble sexe d’humain. Dans sa bouche je sentais qu’elle aspirait fortement tout en me malaxant les testicules violemment. J’avais mal, je sentais qu’elle me dominait, et je m’offrais volontiers à ces exigences. Elle m’attrapa par la nuque, et me fourra la tête entre ses jambes. Je dégoulinai comme après avoir mangé une pastèque en pleine canicule.

-« Prends-moi ! »

            Je m’exécutai et la pénétrai fort ; comme paralysé en elle, je ne pouvais plu bouger. C’était intense, j’avais l’impression qu’une machine me masturbait pendant qu’au bout de ces longs bras, ses mains s’agrippaient à mes chevilles. Je vins dans un râle qui m’étonna moi-même. Elle me libéra. J’étais essoufflé, ravi de ces jeux pervers auxquels nous venions de nous adonner. Elle me regarda, s’allongea dans la position du fœtus. Je lui demandai comme tous les hommes font après le coït, si ça lui avait plu, elle ne me répondit pas. Elle grognait comme si elle était malade, j’insistai :

« Vous êtes certaine que tout va bien ? »

            Elle me tournait le dos et j’entendais des bruits de relents. Lorsqu’elle se tourna enfin vers moi, elle avait les joues gonflées et je savais que peut-être, j’avais fait une bêtise. Elle cracha une première fois à terre et je vis une sorte de nourrisson se débattre dans les glaires. Elle recommença trois fois, à chaque crachat sortit un enfant. Moi qui n’en avais jamais voulu sur Terre, je me retrouvais avec quatre petits aliènes sur Rozéatis. Elle me dit :

« Je vais mourir maintenant. »

« Quoi ? » m’exclamai-je.

« Rappelle-toi du regard que tu as vu dans le ciel. »

« Je ne comprends pas ? »

« Il approche », répondit-elle, « donne-lui ces monstres en offrande et prie pour qu’il t’épargne ! »

            Puis j’entendis toute la communauté hurler comme nos loups s’adressent à la Lune. Dans une combustion spontanée je la vis disparaitre. Quel spectacle dramatique et effrayant ! Là, j’entendais, au seuil de sa hutte, son peuple qui la pleurait. Il n’était plus question de télépathie. Je me rhabillai, remis mon casque et de ma main droite, serrai mon couteau. Je mis dans mon sac à dos, sans aucune compassion, ces fœtus agonisants. Mon côté « survival » avait repris le dessus. Je savais où l’on avait emmené Julie, et je comptais bien aller la chercher ! Je comptai :

«  1.2.3. HARRRR ! »

 

 

            Pendant ce temps Stéphane, en zone de quarantaine, avait totalement retrouvé ses facultés. J’avais pris soin de lui laisser la télécommande du robot, afin qu’il le guide pour ouvrir le sas et se libérer. Peut-être avais-je pris un risque, mais j’avais confiance en ce bougre. Une fois libre, il comprit en ne voyant plus qu’une seule voiture à voile que nous étions sur Rozéatis. Il avait deux options, la première était de nous rejoindre à l’aide de la sienne, la deuxième de faire un vol en rase-motte au dessus de cette dernière. S’il ne nous voyait pas, il tenterait de retourner sur Terre. Il hésita, puis il opta pour la seconde. Je sortis précipitamment de la hutte luxuriante, avec la ferme intention de trancher des têtes. Mais, surprise! Julie se tenait devant ces êtres pleurant toutes les larmes de leur corps et me rassura :

« Non commandant ! Ne faites pas ça. Elles sont avec nous, elles ont peur, regardez-les ! »

            Je compris qu’elle avait réussi à les détourner de leurs premières intentions. Je dis à Julie :

« Bien joué Caporal ! Heureux de vous voir en bonne santé. »

« Elles disent qu’il va venir et qu’il va les exterminer ! » me dit-elle. «  Je ne sais pas de qui elles parlent, mon Commandant, mais il serait inhumain de les laisser au griffes de celui-ci ! Qu’en pensez-vous ? »

« Vous avez raison Caporal. » répondis-je.

            A peine avions-nous échangé ces mots qu’une brume rousse et épaisse se posa sur le village. Au loin nous entendîmes des pas lourds et espacés qui nous informaient sur la taille de cet ennemi. Mon couteau semblait être une écharde proportionnellement à celui qui s’approchait. J’ordonnai à Julie d’emmener les femmes à l’abri. Elle me répondit :

«  Et vous Commandant ? 

« Ne t’inquiète pas, je suis Rambo rappelle-toi. » lui répondis-je d’un ton rassurant.

            Elle exécuta mon ordre. Je montai sur la hutte de ma défunte compagne, et vidai dans la partie convexe mes quatre petites progénitures encore vivantes. Un hurlement rauque dissipa la brume et là, je vis un monstre aussi solide que laid ! Il cherchait quelque chose, et d’un coup de patte balayait chacune des huttes du village. Il s’approcha dangereusement de celle où s’étaient réfugiés Julie et les autochtones. J’essayai d’attirer son intention en hurlant mais rien n’y fit. Alors je me rappelai qu’avec mon amante nous échangions par télépathie. Ça fonctionna : il m’entendit, il ne me voyait pas encore mais il m’entendit. Il m’aperçut perché sur le toit de plumes de paon, et se mit à hurler comme pour me dire :

«  Fiston ! Tu vas passer un sale quart d’heure ! »

            Une fois à sa hauteur, j’agrippai, deux dans chaque main, les fruits de ma liaison avec la chef du village, ravagé par ce monstre. Il s’arrêta, il renifla, et ouvrit grand sa gueule, dans laquelle je jetai ces pauvres créatures.

«  Laisse-nous maintenant » lui dis-je, toujours en télépathe.

            Mais malheureusement son appétit n’était pas rassasié. Il mit un coup de patte sur la hutte et m’envoya au sol par la même occasion. Il se retourna et se dirigea à nouveau vers Julie. Je mis quelques secondes avant de reprendre mes esprits. Je pris mon couteau par la lame, visai, et lui lançai en plein milieu de ce qui lui faisait office de dos.

« Bien visé Rambo ! », me dis-je tout seul à voix haute, comme pour me rassurer.

            Le monstre hurla ! Se retourna ! Et se mit à courir en ma direction, bien décidé à me faire payer mon geste. Il m’agrippa dans sa main, prêt à me dévorer ! J’ôtai mon casque et lui jetai dans la gueule. L’effet de l’oxygène fut immédiat ! Il me lâcha et commença à tournoyer sur lui-même. J’avais pensé en effet, peu de temps avant : « Ce n’est pas parce que nous sommes tolérants à l’air de Rozéatis, que leurs habitants le sont forcément à l’oxygène. » Il tomba et mourût ! A ce moment, je tombai comme on tombe après avoir passé ce genre d’épreuve. A genoux, toujours émerveillé, toujours concentré, mais aussi dégoûté, triste et avec le sentiment d’avoir fauté. Ce sentiment serait-il, non pas pour les autres mais pour moi, un jour compensé par celui du devoir accompli ? Je ne savais pas ! Ou plutôt je savais, mais n’avais aucune envie d’y penser. Je fus célébré en héros et Julie me sauta dans les bras en hurlant sa joie de me voir vivant. Peu de temps après, nous vîmes Stéphane nous rejoindre, émerveillé par ce qu’il avait sous les yeux. Sans tarder, nous rejoignîmes notre navette et repartîmes pour la Terre.

 

 

            A bord, nous reprîmes notre sérieux et notre profil de cosmonautes. Pendant que mes deux compagnons s’assuraient du bon état de marche de la navette, j’allai à mon tour en zone de quarantaine. Tout était en règle, nous fermâmes les volets et, après que mon état se fût stabilisé, nous rejoignîmes nos couchettes pour un long sommeil de trois mois, après avoir enclenché la VLA. Comme à l’allée, l’alarme nous réveilla pour nous avertir que nous approchions de la Terre. Qu’elle était belle ! Après un atterrissage réussi, nous fûmes nommés par le Colonel Faré au plus haut grade de l’armée ; nos vestes furent couvertes de médailles. Mais, simplement, nous nous retrouvâmes à la terrasse du « Kalouga » autour d’une marinade de crevettes. Quand Stéphane, fidèle à lui-même, interpela Julie :

«  Au fait Julie, que s’est-il passé au Bambou ? C’est bizarre nous ne t’avions pas revue de la soirée ? »

Elle le regarda, lui sourit, puis en me faisant un clin d’œil, lui dit :

«  Demande au Commandant, il te racontera s’il le souhaite. » 

- Je rougis.

 

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